La gazette du Salon J 3
« Une école citadelle, c’est une école qui meurt ! » a lancé Philippe Delorme secrétaire général en conclusion des trois journées de présence de l’Enseignement catholique au Salon des maires, jeudi 21 novembre.
Rapportée à la grande problématique d’une « prospective du sens », cette interpellation invite à réfléchir au maillage territorial de l’Enseignement catholique, pas seulement en termes économiques mais aussi au prisme « de son utilité, vis-à-vis de la demande des familles comme des territoires en déprise démographique ».
« Avons-nous toujours les moyens d’exercer notre liberté et de garantir aux familles celle du choix de leur école ? » a interrogé le secrétaire général, appelant de ses vœux davantage de souplesse dans les relations administratives, la création de diplômes, l’organisation des enseignements ou encore le recrutement.
Refuser d’être citadelle, c’est aussi fonctionner en réseau : « Il s’agit de décloisonner, en interne par des mutualisations solidaires, mais aussi de privilégier tout ce qui favorise la rencontre, levier éducatif fort pour nos jeunes » : ouverture aux élus locaux, au monde associatif, aux entreprises, au handicap, redécouverte de l’excellence des filières professionnelles… » En tant que membre associé au service public d’Éducation, il en a enfin appelé à raisonner, à tous les niveaux, « en termes de complémentarité et pas de concurrence ».
- Le compte-rendu de la journée du 19 novembre, dédiée aux territoires bretons, à lire ici
- Celui du mercredi 20 novembre, dédié à la région lyonnaise et traitant largement de prospective, à lire ici
- Toutes les tables rondes organisées sur le stand de l'Enseignement catholique au Salon des maires 2019 sont
sur sa chaîne YouTube
Pour une allocation différenciée des moyens
Laurent Lafon, sénateur du Val-de-Marne,
co-auteur du rapport sur les « territoires de l’éducation »
Philippe Poussin, secrétaire général du CNEAP
Yann Diraison, adjoint du Secrétaire général de l’Enseignement catholique
« Amener l’administration centrale de l’Éducation nationale à prendre en compte les spécificités territoriales, ce qu’elle ne fait que pour l’éducation prioritaire dont on sait qu’elle est trop figée dans sa cartographie », c’est l’objectif résumé par Laurent Lafon, du rapport co-rédigé avec ?Jean-Yves Roux pour la commission Éducation du Sénat.
Au lendemain de l’intervention de Jean-Michel Blanquer au Salon des maires qui confirmait que la redéfinition annoncée de l’enseignement prioritaire ne serait pas géographique, quelles sont les pistes envisagées par les Sénateurs ? « L’introduction de nouveaux critères d’allocation de moyens tels que l’indice d’éloignement, la déconcentration des pouvoirs de décisions au niveau rectoral, pour plus de proximité avec les acteurs de terrain et une rénovation du dialogue avec les élus qui prenne notamment la forme d’une contractualisation ».
Cette volonté d’introduire de la différenciation dans une politique éducative trop uniforme est pleinement partagée par les responsables de l’Enseignement catholique. Fort des liens étroits que nourrissent les lycées agricoles privés avec les élus et le tissu socio-économique, du fait de la mission d’animation des territoires que la loi leur confie, Philippe Poussin, secrétaire général du Cneap confirme en effet que « l’approfondissement de l’ancrage territorial ne peut que faire gagner de l’efficience au système ». Il se félicite de ce que la fracture de l’école ne soit plus uniquement envisagée, comme ce fut longtemps le cas, au prisme des banlieues, soulignant que cette fracture concerne une partie des territoires ruraux.
Sur la même ligne, Yann Diraison, secrétaire général adjoint de l’Enseignement catholique a aussi souligné que « la conciliation des besoins divergents des zones urbaines et rurales devient impossible à moyens constants ». Outre la souplesse et la contractualisation qu’il estime indispensables à l’évolution du système, il voit aussi dans la réforme en cours des filières professionnelles une opportunité de resserrer les liens avec les acteurs économiques comme les élus locaux.
Dérèglement climatique :
un combat mondial et local
André Flajolet, vice-président de l’Association des maires de France, en charge du développement durable, maire de Saint-Venant
Paul Vitart, président de l’Apel académique de Caen, membre du bureau national de l’Apel
Jérôme Brunet, adjoint du Secrétaire général de l’Enseignement catholique
Que faire face au dérèglement climatique ? « Agir ici et maintenant mais aussi ailleurs ». André Flajolet, vice-président de l’AMF en charge du développement durable et maire de Saint-Venant considère que « les fantassins de la République que sont les élus » mais aussi les autres acteurs locaux tels que les chefs d’établissement doivent apporter des réponses de proximité tout en impulsant une prise de conscience qui va bien au-delà de nos vies quotidienne et des frontières : « Cette question impose de remettre en cause notre système économique, social et relationnel et de refonder en profondeur le faire société. » Face à une logique de consommation effrénée, il convient notamment « de recomposer un temps long où le rapport à la nature et entre les hommes soit harmonieux »
Alors bien, sûr, la question du développement durable commence par le recyclage des déchets et leur limitation, l’approvisionnement des cantines en circuits courts. Il implique de réfléchir à la place de la nature en ville, d’entrer dans une logique d’économie circulaire et de réfléchir à la gestion des ressources à commencer par l’eau. Mais « comme le dérèglement climatique est devenu le seul vrai combat mondial, il nécessite aussi de renouveler un dialogue nord-sud construit structuré et réel »
Des propos, qui, comme l’a souligné Jérôme Brunet, secrétaire général adjoint, font écho « à la prise de conscience dont attestent de nombreux mouvements lycéens » mais aussi « à l’interpellation du pape François qui, dans Laudato Si, invite à repenser la relation à soi, aux autres, à la nature et à Dieu ou à la transcendance. Selon ses termes, « éduquer le futur », c’est bien changer de logiciel relationnel et, pour l’école, s’inscrire dans un écosystème bien plus large qu’elle-même » Une réflexion qui sera prolongée par le prochain congrès de l’Apel, justement intitulé « enjeux écologiques, défis éducatifs » Paul Vitart, du bureau de l’Apel a assuré l’événement plaiderait pour « s’éloigner du consumérisme pour revenir à la vérité vraie » et chercherait des pistes pour concilier « la nécessité de polluer moins et le souci de l’ouverture au monde, dans l’esprit par exemple de la démarche « Habitons la planète » portée par les Scouts de France. »
Filières professionnelles, filières d'excellence
Yves Ruellan, président de RenaSup,
Émilie Julien, directrice de l’Agence Excellence pro
Patrick Bizet, chef d’établissement de la Joliverie à Saint-Sébastien-sur-Loire
Stratégies de développement, rénovation des formations, partage d’expériences… L’enseignement catholique a engagé l’an dernier une réflexion autour des filières professionnelles qui se prolongera, les 12 et 13 mars 2020, par le salon Excellence pro, premier du genre et vitrine ouverte sur les savoir-faire de l’Enseignement catholique. « Ce Salon permettra aussi aux chefs d’établissement de rencontrer les professionnels des branches et les nouveaux opérateurs de compétences, tandis que les prescripteurs d’orientation -professeurs principaux et parents impliqués dans les BDI recevront une information spécifique » détaille Yves Ruellan, président de ParcourSup, co-organisateur de l’événement avec le Cneap.
La toute nouvelle Agence Excellence pro aide aussi les chefs d’établissement à se repérer dans « le big bang de la formation professionnelle », comme l’explique Emilie Julien, sa directrice : « Il faut les initier à des structures et des modalités de financement nouvelles, les aider à développer l’apprentissage et à renouveler leurs rapports aux branches professionnelles et aux Régions … autant d’évolutions qui vont permettre d’améliorer l’insertion professionnelle des jeunes… Mais qui nécessitent d’être pro-actifs pour adapter les formations aux métiers porteurs et émergeants et pour répondre aux besoins des secteurs sous tension »
Au lycée pro, des allers et retours sont désormais possibles entre formation sous statut scolaire et par voie d’apprentissage, les publics d’apprenants peuvent aussi être mixés et une procédure d’ouverture simplifiée a donné lieu à la création de près de 400 CFA en deux mois. « Il faut accepter qu’il va y avoir du mouvement et y prendre part de manière collégiale, en travaillant davantage en réseau » commente Patrick Bizet, directeur de la Joliverie qui fête en 2020 ses 100 ans de pédagogie de projet mené en lien étroit avec le territoire nantais.
Forts de 4600 apprenants répartis dans 70 formations déclinées pour la plupart sous statut scolaire et en apprentissage et portées, pour 14 d’entre elles conjointement avec des écoles d'ingénieur, il sait combien la capacité d’adaptation demandée aux jeunes professionnels va être indispensable aux établissements pour adapter leurs formations aux nouveaux métiers et besoins : « il faut aussi changer les mentalités et casser la hiérarchie entre les formations professionnelles et générales. Le beau parcours, c’est celui qui permet au jeune de réussir. Et en la matière, tant que l’efficacité d’un collège sera mesurée à la proportion d’élèves qu’il conduit vers la voie générale, il y a du travail ! »
Nos chères cantines
Marie-Cécile Rollin, directrice du réseau Restau’Co
Aurélia de Saint-Exupéry, secrétaire générale de la Fnogec
Christophe Abraham, secrétaire général adjoint de l’Apel
Faire une occasion d’éducation au gout et au développement durable via la lutte anti-gaspillage… Voilà un levier de développement durable fort exploré par de nombreux établissements.
Exemple à l’école parisienne sœur Rosalie-Louise de Marillac qui a pris trois ans pour dénicher le prestataire qui remplissait les critères d’un cahier des charges particulièrement exigeant en termes de réduction des déchets, prix de revient, qualité de restauration, proportion de bio, encadrement des équipes de restauration. Un pari réussi puisqu’en trois mois de fonctionnement, elle affiche 80% de déchets en moins et une fréquentation en hausse de 10% en optant pour la société 1001 repas qui fait de la qualité nutritionnelle et de la lutte anti-gaspillage associée à une sensibilisation aux inégalités alimentaires sa marque de fabrique.
Autre alternative possible pour augmenter la qualité et la dimension éducative du temps de restauration, celle de la gestion directe, qui permet d’avoir un rôle économique sur son territoire et d’animer le moment du repas avec ses propres personnels. Une option écologiquement fort intéressante qui doit se conjuguer avec une maîtrise des coûts si l’enseignement catholique veut rester ouvert à tous a souligné Christophe Abraham, secrétaire général adjoint de l’APEL.
« Seuls 10% des établissements catholiques font le choix de la gestion directe car cela représente un coût qui, au même titre que celui que va générer la loi Égalim qui impose une part de bio en cuisine collective, représente un frein pour nos établissements, constate Aurélia de Saint-Exupéry, secrétaire générale de la Fnogec. Elle a en effet rappelé que « seuls 30% des Ogec reçoivent des subventions publiques pour la restauration et ce poste devient parfois plus coûteux pour les familles que la contribution qu’ils versent à l’école. » A tous ceux qui voudraient néanmoins tenter l’aventure qui requiert une solide expertise, elle conseille de s’adosser à restau Co, réseau qui peuvent les accompagner, notamment via des outils et de la formation.
Bertrand de LAUSUN, président de l’Ogec de l’école Soeur Rosalie-Louise de Marillac (Paris 5)
Stéphanie CHEMIN, présidente de l’Apel de l’école Soeur Rosalie- Louise de Marillac (Paris 5)
Jean-Frédéric GEOLIER, PDG de 1001 Repas,
responsable des Entrepreneurs et dirigeants chrétiens, président de RCF Lyon