Les profs du privé au forum des enseignants innovants
Une belle énergie régnait sur le Forum des enseignants innovants qui s’est tenu le 23 novembre à Paris Expo Porte de Versailles. Près d’une centaine d’enseignants ont présenté leurs projets et réalisations à leurs collègues dans une ambiance enthousiaste.
Mireille Broussous
Blasés, fatigués, à bout de force ? Ce n’est pas du tout l’image que donnaient les profs lors du 11ème Forum des enseignants innovants organisé par Le Café pédagogique en partenariat avec le quotidien Libération. Durant toute la matinée, les participants ont présenté inlassablement leurs réalisations à leurs collègues. Les initiatives émanent des enseignants eux-mêmes, elles sont individuelles ou prises parfois par quelques professeurs liés entre eux par une solide amitié et une même vision dynamique de l’enseignement.
Liste à la Prévert
Certains enseignants emmènent de jeunes décrocheurs au bout du monde afin qu’ils reprennent confiance en eux. D’autres apprennent la plongée sous-marine à leurs élèves de 6e qui parfois, en début d’année, savent à peine nager. Des enseignants se focalisent sur la didactique, usant de toutes les ressources des nouvelles technologies pour faciliter l’apprentissage des mathématiques, de l’anglais ou des SVT. D’autres encore veulent faire grandir leurs élèves grâce à l’art et au théâtre ou en travaillant sur la citoyenneté, le vivre ensemble ou l’écologie…
La centaine de projets sélectionnés sur les 250 déposés constitue une sorte de liste à la Prévert. Aurélie Malassenet, enseignante en école primaire à Châteauroux (36), parvient à améliorer les compétences de lecture à voix haute des élèves de CE1 et CE2 grâce à des projets de lecture radiophonique. Isabelle Clou-Menessart, professeur d’histoire géographie et d’EMC au lycée Marie-Curie de Nogent-sur-Oise (60) utilise aussi la radio mais avec un tout autre objectif. Les élèves travaillent sur leur profession de foi en vue des élections au conseil des délégués pour la vie lycéenne (CVL) et en présentent les grandes lignes sur la radio du lycée.
Rachid Sadaoui, professeur de géographie au collège Lucie-Aubrac de Tourcoing (59) réalise avec ses élèves de 3e des cartographies sonores du quartier de l’Union en cours de réaménagement, afin de mieux comprendre ce qu’est une politique d’aménagement du territoire.
La conseillère pédagogique Carole Cortay et Christophe Gilger, référent mathématiques de la circonscription de Saint-Gervais/Pays du Mont-Blanc, ont inventé le réseau social élève, M@ths en-vie, qui permet d’ancrer les mathématiques dans le réel. Objectifs : créer une émulation autour de la résolution de problèmes et amener les élèves et les classes à collaborer entre eux…
Entre France et Sicile
Des représentantes des écoles privées étaient aussi présentes. Sylvie Lombardo et Sophie Lombardi enseignent respectivement en CM1 et CL2 à l’école Sainte-Marie située à Fuveau près d’Aix-en-Provence (13). Elles aiment la littérature et les arts et s’efforcent d’ouvrir leurs élèves aux langues et aux cultures. Toutes les deux travaillent cette année sur le thème de l’immigration. Les CM1 jouent dans une pièce de théâtre appelée Exil, écrite par Sylvie Lombardo. En fin d’année, ils se produiront non seulement en France mais aussi en… Sicile. « Ils partiront une semaine et joueront la pièce devant des collégiens qui apprennent le français. Ensuite les jeunes Siciliens seront accueillis pendant une semaine par les familles françaises », précise Sophie Lombardi. Cette dernière a, quant à elle, rejoint avec sa classe le projet du collège de la ville qui se lance dans la création de la comédie musicale On n’arrête pas les oiseaux, racontant l’histoire d’un migrant. « Pour les CM2, c’est très intéressant de participer à ce spectacle car ils ont ainsi l’occasion de monter sur scène, ce qui les fait grandir, et ils mettent un pied au collège », explique-t-elle. Son projet ne s’arrête pas là. Les enfants de sa classe explorent aussi leur arbre généalogique et découvrent que, bien souvent, l’histoire de leurs ancêtres a démarré hors de France.
Faire pousser des cacahouètes
Dans un tout autre genre, Nicole Broux, enseignante de maternelle à l’école Saint-Claude de Tassin-la-Demi-Lune (69) a créé une activité baptisée « Les p’tits jardiniers de Saint-Claude ».
À l’origine, il s’agissait simplement de végétaliser la cour des maternelles en créant des carrés potagers. Le projet a grandi au fil du temps. « Un intervenant nous a aidé en apportant de la terre, en proposant des cultures et en nous donnant des idées d’événements festifs à organiser autour des plantations », explique Nicole Broux. Toutes les idées des enfants ont été testées. Ils ont cultivé des plants de cacahouètes et en ont obtenu quelques-unes. « À chaque fois, nous essayons de comprendre pourquoi ça marche ou ne marche pas », indique Nicole Roux. Initiés à une démarche écologique, les élèves doivent chercher à utiliser le moins d’eau possible lors des arrosages. Ne recourant bien sûr pas aux pesticides, ils font aussi des rencontres intéressantes. Ce jardin est aussi l’occasion de coopérer avec les CM2 qui mettent la main à la terre pour aider les maternelles. Et des plantations à l’alimentation, il n’y a qu’un pas. Du pain a été réalisé à partir d’une petite récole de blé. Des soupes végétales, des gratins de blettes, des confitures de tomates ont été cuisinés – puis dégustés – par les enfants.
Autre initiative, celle encouragée par l’association AFaLaC, (Famille, langues, cultures). Très active dans l’Ouest de la France – son siège est au Mans (72) – elle est hébergée, à Rennes (35), par l’école Saint-Armel. « Notre objectif est de valoriser les langues maternelles des parents à partir des albums pour la jeunesse dans lesquels il existe toujours un fond d’histoire commune », explique Françoise Leclaire, professeur des écoles et psychopédagogue. Ainsi, en cycle 1, des ateliers d’histoires plurilingues sont co-animés par les parents, des imagiers également plurilingues sont créés. Une façon de faire entrer les parents dans l’école.