Accompagner le retour en établissement

Le 7 mai dernier, lors d’une visioconférence organisée par le Sgec, des représentants d’une vingtaine de directions diocésaines ont échangé sur la façon dont ils accompagnent les chefs d’établissement et envisagent la reprise.

François Husson

« On apprend à traverser ensemble cette situation inédite », a déclaré Jérôme Brunet,
adjoint au secrétaire général de l’enseignement catholique, en ouverture de la
visioconférence qu’il animait le 7 mai dernier sur le thème « Accompagner le retour en
établissement ». Plus d’une vingtaine de participants – directeurs diocésains, adjoints,
chargés de mission, psychologues…– ont pu, par écrans interposés, et pendant plus
d’une heure, partager leurs réflexions et échanger des ressources. Avec un objectif
commun : soutenir les chefs d’établissement. « Comment aller plus loin avec des équipes
épuisées ? », a lancé Christine Béaur, directrice diocésaine du Tarn, quand Claire Bouet,
psychologue à la direction diocésaine de Caen, s’inquiétait « du contrecoup, au vu de
toutes les énergies déployées… » et Valérie Marmoy, adjointe diocésaine en pastorale à
Nice, se demandait « Comment garder le souffle sur le long terme ? »

 

Des visites virtuelles des collèges

 

Une fois posées ces questions préliminaires, les participants ont échangé sur leurs actions. Alain Larhant, adjoint pour le 2n d degré à la direction diocésaine des Côtes- d’Armor, a ainsi évoqué son groupe de travail, renforcé par des psychologues : « Nous appelons chaque semaine les chefs d’établissement pour avoir leur ressenti, et nous organisons des visios en groupes pour partager leurs difficultés et leurs perspectives. Dès le 6 mai, nous avons aussi mis à leur disposition trois fiches techniques : la première pour préparer la journée de reprise ; la deuxième pour adapter les pratiques pédagogiques à un nouvel environnement scolaire ; la troisième pour que les collèges puissent proposer des visites virtuelles de leur établissement aux CM2. »

Au Mans (72), c’est un conseil de direction, élargi aux responsables de l’Udogec (Union départementale des organismes de gestion de l’enseignement catholique) et aux personnels Ulis (Unité localisée pour l’inclusion scolaire), qui a vu le jour, avec « une permanence d’écoute, tenues deux fois par semaine par chaque chef d’établissement, a expliqué Anna Ollivier, psychologue du diocèse. Et depuis les vacances, des petits groupes de chefs d’établissement échangent lors de visioconférences. Parallèlement, on a préparé un document sur comment prendre soin de soi, de son équipe, des enfants et des parents. Ce sont des ressources concrètes… ».

« On fonctionne en pyramide »

 

La cellule de crise de la direction interdiocésaine de Meurthe-et-Moselle et de Meuse a, quant à elle, intégré les chefs d’établissement, et multiplie les visioconférences dans ses bassins. « Dans les écoles isolées, les chefs d’établissement se sont mis la pression, a pointé la chargée de mission Catherine Pellerin. Ils sont très préoccupés par l’aspect organisationnel... Mais on voit des choses très positives : des responsables du 2 d degré ont mis des personnels à disposition d’établissements du 1 er degré. » En Seine-Saint-Denis, c’est une cellule restreinte qui prépare la reprise : échanges individuels fréquents avec les chefs d’établissement, padlets à destination des familles et des enseignants…

« Nous utilisons les outils de l’Anpec (Association nationale des psychologues de l’enseignement catholique), a précisé la psychologue Juliette Houriez. Ils permettent de repérer les personnes les plus vulnérables en s’appuyant sur celles qui sont solides. On a proposé des vidéos de deux minutes pour lutter contre l’anxiété et le stress de la reprise, et on fonctionne en pyramide : on soutient les chefs d’établissement, qui soutiennent les équipes, qui soutiennent les familles… »

« Soyons dans une posture d’étayage plutôt que de contrôle ! »

 

Si certains diocèses, dépourvus de psychologues, comme Strasbourg ou Créteil, ont fait appel à des ressources extérieures, la Haute-Savoie s’est appuyée sur ses cinq praticien pour nourrir des échanges dans ses bassins. « Nous avons fonctionné sur les réalités locales, a exprimé Emmanuel Roig, chargé de mission. Pour nous, il est important d’inclure les parents dans les cellules, et d’interroger la pertinence des outils et la manière de les apporter aux chefs d’établissement. »
Et des outils, le diocèse de Marseille en a fournis : des feuilles de route « petites mais précises », a commenté l’adjointe Nathalie Frénoy. « Notre groupe de travail “Vers la reprise” comprend des chefs d’établissement des 1 er et 2 d degrés déjà en réseau. Nous avons créé plusieurs entrées (financière, organisationnelle, psychologique…). Nos ressources sont produites en lien avec celles du Sgec, comme les padlets thématiques. C’est mieux que d’envoyer trois mails par jour ! Pour nous, c’est le terrain qui a les bonnes idées, soyons dans une posture d’étayage plutôt que de contrôle ! »

Gilbert Bicrel, adjoint au directeur diocésain du Finistère, a rebondi lui aussi sur l’importance de valoriser les expériences de terrain. « Notre cellule se fonde sur le retour d’expérience, avec une relecture pour maintenir le lien sous toutes ses formes. On fait beaucoup de visios, certaines en proximité, d’autres massives avec 200 personnes. En avançant, on a décidé d’être ambitieux, mais sur un nombre restreint de sujets. L’idée est de diffuser de moins en moins d’informations mais de façon plus concentrée, et avant tout d’aller au contact de tous. »

« Ne pas perdre ce qui s’est joué »

 

Nathalie Tanchon-Quelquejeu, référente formation à la direction diocésaine de Paris, s’est projetée dans les mois à venir : « On va monter un groupe « résilience » avant l’été, autour de la mutualisation des initiatives et de l’accompagnement individualisé par téléphone, avec deux points d’attention : ne pas perdre ce qui s’est joué et valoriser les initiatives prises pendant le confinement. » Car « l’année prochaine sera singulière », a prévenu la psychologue Juliette Houriez, rejointe par Bertrand Caravita, adjoint en pastorale du diocèse de Beauvais, qui esquissait « la perspective de rebondir grâce à la synergie des expériences des chefs d’établissement ».

Pour Apprentis d’Auteuil, qui a créé un groupe national de travail pour soutenir les chefs d’établissement dans leurs décisions, « il va être aussi important de tenir compte de la parole des enfants et des familles, a noté son représentant Thomas Etourneau, coordinateur du pôle Décrochage. Les chefs d’établissement veulent bien faire, mais l’accueil ne doit pas être second. Il faudra continuer à travailler sur l’humain malgré les incertitudes ».
Au terme de ces échanges très riches, Jérôme Brunet a présenté une série de ressources disponibles sur le site du Sgec : padlets « Tenir dans la durée », webinaire, et notamment une réflexion sur la résilience institutionnelle fondée sur les travaux du chercheur Gilles Teneau.

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