En dialogue, au Salon des maires
Au diapason du Congrès des maires, placé sous le signe du «Pouvoir d’agir», Philippe Delorme, secrétaire général de l’Enseignement catholique a réaffirmé, le 21 novembre dernier, en direct du Salon qui se tient au Paris Expo de la porte de Versailles jusqu'à jeudi, vouloir que l’Enseignement catholique participe à construire une société plus fraternelle, notamment en luttant contre la tentation de l’entre-soi.
Partageant aussi les difficultés conjoncturelles que connaissent les élus, il a annoncé un état des lieux en cours avec la Fédération nationale des Ogec pour recenser les établissements menacés par la crise.
Il invite néanmoins à transformer cette situation délicate en opportunité pour innover encore davantage, s’adapter aux besoins éducatifs émergents, engager des restructurations, intensifier le dialogue et nouer des partenariats…
Autant de pistes justement explorées au cours de la démarche prospective de l’Enseignement catholique, qui rentre en janvier prochain dans sa phase opérationnelle.
À La Réunion, des objectifs éducatifs communs
Nathalie Bassire, députée de La Réunion
Philippe Brault, directeur diocésain
La députée de La Réunion et son directeur diocésain ont tout pour s’entendre. Ils partagent un profond attachement à la liberté de l’enseignement, le souci d’une éducation intégrale qui fasse la part belle à l’éveil d’une conscience environnementale et à un vivre ensemble qui conçoit l’interculturalité comme une chance.
Tant mieux, car d’importants challenges éducatifs s’offrent à eux, notamment un taux d’illettrisme à nouveau pointé dans un rapport sénatorial de 2020.
Professeur des écoles pendant vingt-quatre ans, avant d’être repérée pour son implication dans la cité et de s’engager en politique, Nathalie Bassire, a insisté sur l’importance d’une approche multipartenariale qui mette l’École en lien avec les relais éducatifs du tissu associatif, pour enrichir l’offre périscolaire pour tous les enfants et renforcer le lien aux familles.
L’Enseignement catholique se retrouve ainsi naturellement inclus dans les actions menées en coopération avec l’armée ou les acteurs du monde professionnel. En retour, Philippe Brault a indiqué qu’il travaillait « à renforcer la différenciation pédagogique pour une école catholique plus inclusive et à réécrire un projet diocésain plus lisible qui incite des familles moins favorisées à le rejoindre ».
Ainsi, le futur lycée de l’Est, en projet dans une zone où l’Enseignement catholique est peu présent, entend incarner ces valeurs d’ouverture. Dans le même esprit, le lycée professionnel Saint-François-Xavier de la Fondation d’Auteuil, basé à La Montagne, région enclavée et isolée, est délocalisé en partie sur le Port, au sein du Campus Elie sous tutelle diocésaine, où l’internat accueille certains de ces élèves de la 3e au bac Pro .
Enfin, l’Enseignement catholique entend également répondre présent au défi de l’éducation au développement durable et à la préservation du riche patrimoine naturel de l’île, rejoignant l’un des combats de la députée Nathalie Bassire qui siège aussi au Conseil national de la transition écologique et compte bien que La Réunion investisse les énergies renouvelables.
L'Enseignement catholique,
partenaire du monde professionnel
Christophe Moulin, président du Secimep, Syndicat des entreprises de commerce international des matériels d'emballage
Émilie Julien, directrice de l'Agence nationale Excellence Pro
Un escape game pour faire connaître la filière des métiers de l’étiquetage et de l’emballage, des conférences dans des salons de découverte des métiers, des visites d’entreprises par des élèves, des interventions de professionnels en milieu scolaire et des propositions de stages et d’alternance… Sans oublier une soixantaine d’offres d’emploi en CDI. Voici les fruits du partenariat signé cet été 2022, entre le Secimep, Syndicat des entreprises de commerce international des matériels d'emballage et l’Agence Excellence Pro, crée en 2019 pour promouvoir les formations professionnelles de l’Enseignement catholique.
Sa directrice, Émilie Julien, chargée d’animer le réseau des 1100 établissements de l’Enseignement catholique proposant des formations du CAP au bac +5 dans tous les secteurs d’activité, explique que son développement implique « une visibilité augmentée auprès des branches, devenues de acteurs prépondérants de la formation professionnelle depuis 2018 ».
D’où l’intérêt de la convention-cadre passée entre l’Agence et le Secimep, qui réunit 40 PME, affiche une croissance de 6% mais aurait besoin d’embaucher 10% de techniciens en plus… « Nos métiers, techniques et commerciaux souffrent d’un déficit d’image et de visibilité alors qu’ils offrent des possibilités d’employabilité importantes, avec des salaires et des perspectives de carrière tout à fait intéressants. D’où notre souhait de nous rapprocher du monde de l’enseignement pour mieux nous faire connaître et donner envie aux jeunes de nous rejoindre dans le contexte de plein emploi que nous connaissons », renchérit Christophe Moulin, président du Secimep, qui se félicite de ce partenariat « gagnant-gagnant ».
« Comme souvent dans l’Enseignement catholique, c’est une coopération initialement nouée entre le syndicat et un lycée parisien qui, grâce à la convention-cadre, connaît aujourd’hui un déploiement national avec des retombées dans tout le territoire », se félicite Émilie Julien, heureuse de resserrer le lien symbiotique école-entreprise, d’autant plus essentiel en temps de crise. Le tout au service de l’aide à l’orientation et de l’insertion professionnelle des jeunes !
Les défis de la crise, de l'éducation prioritaire,
du recrutement...
Yann Diraison,
adjoint au secrétaire général de l'Enseignement catholique
« Plus de 2 millions d’élèves scolarisés chez nous, ce sont autant de raisons d’espérer ! », positive Yann Diraison, adjoint au secrétaire général de l’Enseignement catholique, avant d’évoquer les sujets d’inquiétude qui ont marqué cette rentrée 2022 : une baisse démographique et l’impact de la crise économique – notamment énergétique – deux facteurs qui risquent d’aggraver la perte d’élèves déjà enregistrée cette année.
« Même nos établissements les mieux lotis ont cette année puisé dans leur liste d’attente dans des propositions totalement nouvelles, signe que le coût de la scolarité, même modéré, redoublé par celui de la demi-pension, plus important, devient trop lourd pour certaines familles. »
Un constat qui permet à Yann Diraison de brocarder le faux procès fait à l’Enseignement catholique concernant son indice de positionnement social (IPS), plus élevé que celui du public : « C’est une réalité dans les centres-villes où nous sommes historiquement implantés, mais nous ne sommes pas responsables des politiques d’aménagement urbain qui ont conduit à leur gentrification ! Par ailleurs, dans des académies telles que celles de Lille ou de Rennes, notre IPS est quasi équivalent à celui du public. (…) Tandis que dans certains endroits, ce sont nos établissements qui sont plus mixtes ! », conclut Yann Diraison, citant les 18 établissements ré-associés à la politique d’éducation prioritaire depuis la rentrée 2021, après dix ans de bataille pour que l’engagement de l’Enseignement catholique sur ce front soit à nouveau reconnu. « Il y a une hypocrisie de certains élus à nous reprocher une population scolaire trop favorisée, tout en refusant d’attribuer des aides sociales aux élèves défavorisés qui choisissent nos établissements ! », fait-il remarquer. Et ce d'autant plus que l’Enseignement catholique participe aussi à la mission de service public par son mode de répartition interne des moyens, « qui favorise le secteur rural où nous avons le souci de maintenir un maillage le plus harmonieux possible », pointe-t-il.
Concernant la crise des vocations enseignantes, si l’Enseignement catholique connaît également une courbe descendante, il conserve son attractivité, liée notamment « à la richesse de la vie des communautés éducatives et à la liberté d’innovation laissée aux équipes », a expliqué Yann Diraison, faisant valoir que les derniers concours ont permis de pourvoir tous les postes vacants dans l’Enseignement catholique. « La crise de recrutement du public nous impacte tout de même, car les rectorats assèchent notre vivier de suppléants pour pallier leur manque d’enseignants titulaires », a-t-il toutefois précisé, signalant que la revalorisation du métier figure parmi les axes de travail de la dynamique prospective de l'institution.
« Ce contexte difficile ne simplifie pas la relation aux élus, notamment dans les petites communes, durement fragilisées aussi par la crise », admet Yann Diraison, qui se félicite néanmoins de ce que certains élus, lucides, ont déjà revalorisé les forfaits et raccourci leurs délais de paiement.