Apprendre à parler d’amour aux écoliers
La direction diocésaine de l’Orne a doté chacune de ses écoles d’un référent l'éducation affective, relationnelle et sexuelle. En février et mars derniers, trente-deux enseignants et chefs d’établissement du 1er degré se sont ainsi formés.
Par Noémie Fossey-Sergent
En Normandie, la direction diocésaine de l’Orne a fait le choix de former un référent pour l’éducation affective, relationnelle et sexuelle (EARS) dans chacune de ses écoles. Une initiative plutôt rare dans le premier degré alors que l’EARS est pourtant obligatoire depuis 2003, à raison de trois séances annuelles à chaque niveau dès le primaire. Bien souvent, ces formations se résument en effet à des interventions ponctuelles en classe de CM2.
La genèse du projet remonte au 7 mars 2015. Ce jour-là, une grande journée interdiocésaine est organisée à Caen sur le thème « Parlez-moi d’amour », à l’invitation des trois évêques de Basse-Normandie. À cette occasion, l’évêque de Séez, Mgr Habert, formule le souhait de faire de l’EARS une priorité. En réponse à cette demande et en cohérence avec le projet diocésain, Xavier Leturcq, le directeur diocésain, invite les trente-deux écoles de son réseau à envoyer un enseignant ou chef d’établissement pour être formé comme référent « Éducation à la vie ».
En lien avec les parents
Missionné par la direction diocésaine, et en partenariat avec l’Isfec Normandie, le CLER (Centre de liaison des équipes de recherche sur l’amour et la famille) a élaboré deux sessions de formation de deux jours.
Édith Berlizot, du CLER, a formé une partie de ces trente-deux personnes. Lors de la première journée, après avoir créé un climat de confiance, la formatrice a dressé un état des lieux des défis éducatifs à relever. Parmi eux : la question du rapport homme/femme et de la représentation du corps dans les médias qu’elle a abordée à travers des vidéos de sketchs trouvées sur le Net ou des affiches publicitaires. La pornographie a aussi été évoquée. « Les participants ont pu exprimer leurs nombreuses craintes. Est ressortie l’idée d’une nécessaire éducation à la relation et à la pudeur », confie Édith Berlizot. En prenant appui sur le texte d’orientation promulgué par l’enseignement catholique, elle a rappelé aux participants quelques repères incontournables : l’unité de la personne, la différence et la complémentarité masculin/ féminin… et insisté sur la nécessité de régulièrement informer les parents afin de dissiper tout malentendu et de bien leur laisser la première place en tant qu’éducateurs à la vie.
L’après-midi a été l’occasion pour les participants d’établir le lien avec les compétences psychosociales définies par l’OMS et de faire quelques exercices d’estime de soi. « Nous avons ensuite évoqué le développement psycho-affectif des enfants et l’importance de leur parler de l’amour et de la sexualité, en prenant soin de rester positif et de ne pas transposer nos peurs d’adultes. » Pour guider la réflexion des futurs référents EARS, Édith Berlizot les a, en outre, poussés à se demander : « Qu’ai-je reçu dans ce domaine-là, enfant ? Qu’est-ce qui m’a manqué ? Qu’est-ce qui m’a marqué ? ». Avant de leur donner quelques clés sur la bonne posture d’écoute et l’importance de la reformulation pour conclure cette première journée.
Lors de la deuxième journée qui s’est déroulée plusieurs semaines plus tard, les participants ont pu se familiariser avec des outils et notamment la mallette, conçue par la Fondation Apprentis d’Auteuil et le Sgec, Au fil de la vie (cf. p. X). A suivi un rappel sur la juste distance de l’enseignant et les interdits à respecter : fusion, mensonge… « Enfin, nous avons vu comment décrypter une vraie question d’enfant derrière une formulation qui peut paraître anodine et rappelé qu’il faut faire preuve de vigilance quand un enfant détaille trop un récit afin de préserver le groupe ».
De retour dans son établissement, « chaque référent pourra sensibiliser, à son tour, les membres de sa communauté éducative, explique
Thierry Moisdon, adjoint chargé de la pastorale à la direction diocésaine, l’EARS étant l’affaire de tous ».