Organisations lasalliennes

Frédéric Moureaux dirige le groupe scolaire parisien des Francs-Bourgeois, sous tutelle des Frères des écoles chrétiennes. Son établissement qui accueille un petit nombre d’enfants de personnels de santé, assure une continuité pédagogique pour près de 2 000 élèves.

Son collègue du premier degré, Cyrille Radeau, détaille l'organisation en coopération inter-établisssements de l'accueil des enfants des personnels de santé, de protection de l'enfance et, depuis le 30 mars, des forces de sécurité intérieure.

Au niveau de la congrégation, la mutualisation va aussi bon train avec un padlet qui mutualise les initiatives prises aux quatre coins de la France!


Sylvie Horguelin

Frédéric Moureaux, chef d'établissement coordinateur et son collègue Cyrille Radeau, chef d'établissement du primaire © Les Francs-Bourgeois

Fermer l’établissement a-t-il été difficile ?

Frédéric Moureaux : Nous l’avions anticipé. Le 10 mars, lors d’une assemblée générale, j’ai présenté à tout le personnel le « Plan de continuité pédagogique et administrative », mis en place par l’État lors de la pandémie du H1N1, que nous étions invités à réactiver. Il permet de lister tout ce qui doit être fait en cas de fermeture. Cela a rassuré la communauté éducative. Quand la nouvelle est tombée, le jeudi 12 mars, nous étions déjà en pré-alerte. Le vendredi 13, les élèves ont récupéré leurs affaires et les professeurs ont pu leur donner les premières consignes de travail pour le lundi suivant. Nous avons préparé en même temps la fermeture des locaux : la gestion des denrées périssables, la sécurisation des bâtiments, la remise des ordinateurs portables au personnel administratif pour le télétravail…

 

Mais votre établissement reste en partie ouvert…

F. M. : En effet puisque nous accueillons des enfants des personnels soignants dans les locaux de l’école primaire. Le reste du personnel est en télétravail hormis trois personnes qui ont un logement de fonction dans l’établissement : moi-même le chef d’établissement, le responsable de la sécurité et le « référent » de notre résidence pour étudiants. Nous hébergeons en effet vingt-deux filles et garçons venus suivre des études supérieures à Paris. Cinq d’entre eux sont restés. Nous restons en contact avec eux et leur proposons des activités de détente.

 

Comment assurez-vous une continuité pédagogique ?

F. M. : Grâce à l’ENT (Espace numérique de travail) Itslearning que nous avons mis en place il y a quatre ans. Il fonctionne avec Pearltrees, un intégrateur de ressources pédagogiques génial. Les professeurs déposent sur l’ENT documents et travail pour les élèves puis ils récupèrent leurs exercices. Certains enseignants utilisent aussi Teams pour organiser des classes virtuelles. Comme de nombreux établissements, en début de semaine 1 nous avons rencontré des problèmes de connexion (lenteur, engorgement des réseaux…). Côté équipement informatique, les jeunes utilisent leur matériel personnel à l’exception des élèves de 2nde et du dispositif Ulis qui sont dotés de tablettes. Je salue ici le travail remarquable du service informatique qui effectue la hotline pour les élèves et les personnels.

 

Peut-on réellement parler de « continuité pédagogique » ?

F. M. : Le terme « continuité » me gêne. On ne fait pas la même chose qu’en classe. Presque tout passe désormais par l’écrit. On est en train de vivre une vraie révolution dans la transmission des savoirs. Et je constate que les enseignants ont une grande capacité de créativité. Cette expérience inédite va laisser des traces dans notre manière d’enseigner !

Une question se pose toutefois : celle de l’évaluation. Que va-t-on évaluer et sous quelle forme ? Les devoirs sur table vont-ils être remplacés par des QCM ou des enregistrements oraux ? Quelle valeur donne-t-on au travail rendu ?

 

Quel premier bilan faites-vous de cet enseignement à distance ?

F. M. : Cela fonctionne bien à 90 %. Mais nous constatons que la multiplicité des outils utilisés par les enseignants et le niveau d’autonomie numérique des élèves et des familles compliquent la relation pédagogique. C’est pourquoi avons décidé d’équiper tout le personnel et les élèves avec Office 365. Autre frein bien sûr : l’accompagnement très variable des enfants à la maison. Les responsables de la vie scolaire sont chargés d’appeler les familles quand un élève ne se connecte pas. Les raisons sont multiples. Les parents qui travaillent n’ont pas tous le temps de suivre leurs enfants. Certains sont malades. Il arrive aussi qu’il n’y ait qu’un ordinateur pour toute la famille… Enfin, des familles sont parties dans des résidences secondaires où la connexion n’est pas bonne, voire inexistante.

 

Certains enfants vivent-ils mal le confinement ?

F. M. : Des élèves confient en effet à leurs enseignants qu’il y a des tensions au sein de leur famille. Le confinement est éprouvant pour tous. C’est pourquoi les deux psychologues de l’établissement vont proposer une téléconsultation aux élèves (en particulier ceux qui venaient au « point-écoute ») mais aussi aux parents et aux personnels. Chacun pourra évoquer ses difficultés ou demander un conseil. Nous allons adresser un courrier à la communauté éducative pour l’en informer. L’association des parents d’élèves, partenaire dans notre dispositif éducatif, a par ailleurs fourni des fiches techniques sur la gestion du confinement pour les enfants. Elles portent sur des sujets aussi divers que « Comment gérer l’usage des écrans de mon enfant durant la période du confinement ? », « La psychomotricité à la maison » pour l’école et le collège/lycée ou encore « Comment aider votre enfant anxieux face au Coronavirus ? ». Élaborées par le service de psychiatrie de l'enfant et l'adolescent de l'hôpital Robert Debré, elles permettent de mieux accompagner les familles dans leur quotidien. 

 

Fiche d’identité 

Sous tutelle des Frères des écoles chrétiennes, le groupe scolaire parisien des Francs-Bourgeois – La Salle scolarise 2 100 élèves avec une école primaire (240 enfants, du CP au CM2), un collège doté d’une Ulis (1 050 élèves), un lycée général (800 élèves) et une section technologique STMG option Systèmes d’information de gestion (45 élèves). L’établissement se trouve sur deux sites : 21 rue Saint-Antoine (IVè arr.) et 1 rue de Béarn (IIIè arr.).

 

 

Quatre écoles en réseau pour un accueil de proximité

 

Comment recevoir les enfants des personnels soignants en réduisant les déplacements des élèves et des éducateurs ? Quatre établissements de l’est parisien ont mutualisé leurs moyens pour offrir un accueil de proximité : Les Francs-Bourgeois – La Salle (IVè arr.), Massillon (IVè arr.), Sainte-Geneviève (IIIè arr.), Eugène-Napoléon – Saint-Pierre-Fourier (XIIè arr.). Chaque famille qui répond aux critères d’accueil prévus par l’État, peut ainsi inscrire son enfant dans l’école la plus proche de son domicile et les volontaires travailler ailleurs que dans son établissement d’origine.

Une organisation facilitée par le fait que les chefs d’établissement du 1er degré se connaissaient bien : « Trois d’entre nous sont arrivés ensemble dans le quartier il y a deux ans, explique Cyrille Radeau, chef d’établissement de l’école primaire des Francs-Bourgeois – La Salle. On a l’habitude de travailler ensemble. » Aux Francs-Bourgeois, l’accueil se fait du lundi au samedi, de 8h30 à 16h30. Sur le site de l’établissement, une fenêtre permet d’ailleurs d’accéder à un formulaire pour inscrire son enfant les jours souhaités.

Au programme : travail scolaire le matin et jeux de société l’après-midi. Les enfants apportent un pique-nique froid pour le midi et un goûter. Ils sont encadrés par des volontaires : enseignants du 1er degré, surveillants du 2nd degré et personnels administratifs. Cyrille Radeau tient à préciser les conditions indispensables qui ont été réunies pour permettre cet accueil :

  • Ne pas mettre en danger les personnes. « Nous avons demandé aux personnes de santé fragile, qui ont plus de 60 ans ou qui sont piliers de famille de ne pas se porter volontaires ».

 

  • Protéger les volontaires. « Chaque volontaire est muni de gants et de masques (qu’ils se sont procurés eux-mêmes) et dispose de gel – les laborantins de nos lycées en ayant fabriqué pour eux. »

 

  • Garantir des conditions sanitaires correctes. « Les salles de classe où les enfants étudient et jouent sont désinfectées deux fois par jour et aérées à chaque pause, tout comme les toilettes et la salle où ils déjeunent. »

 

Le nombre d’élèves accueillis reste toutefois modeste, ne dépassant pas dix écoliers pour l’ensemble des quatre établissements – aucune demande n’ayant été faite pour des collégiens. « Les parents qui nous ont sollicités sont des infirmiers, des médecins, un directeur d’hôpital mais avec le recours à la réserve sanitaire, on va sans doute recevoir des demandes de psychologues, de chirurgiens… », avance Cyrille Radeau. En revanche, aucune inscription n’a été faite à ce jour par des parents travaillant pour l’Aide sociale à l’enfance.

 

© Les Francs-Bourgeois

Une boîte à idées lasallienne

Impossible de ne pas la voir ! Sur le site du réseau La Salle France, trône une boîte à idées collaborative. 

Les établissements y postent leurs initiatives « spécial confinement » pour se stimuler réciproquement. Petit florilège recueillis sur ce padlet qui témoigne de la vitalité des établissements sous tutelle des Frères des écoles chrétiennes :

 

  • La Salle - Saint-Étienne (42) : Jean-Paul Lac, professeur de STI, a fabriqué des visières en plexiglass avec l'imprimante 3D du FabLab. Elles serviront à protéger le personnel soignant en première ligne face au COVID-19.

 

  • La Salle – Passy-Buzenval, Rueil (92) : Tous les mercredis, à l'heure de la messe de l’établissement, l'équipe pastorale adresse à la communauté éducative, parents inclus, textes, prières, intentions, liens vers des ressources, pour vivre ensemble, malgré la distance, un temps de partage.

 

  • Notre-Dame – La Salle, Pont-à-Mousson (54) : A chaque jour de confinement sans école (4 par semaine), les enfants découpent puis colorient une fleur. Ils gardent toutes ces fleurs précieusement dans une enveloppe. Quand l’école rouvrira, elles seront rassemblées pour réaliser une fresque colorée pleine de sourires.

 

  • La Salle - Pantin (93) : Conscient des difficultés que représentent le confinement, l’établissement propose des séances de sophrologie pour tous. Enfants et adultes sont confiés au bon soin de la sophrologue Brigitte Dopp, via des capsules vidéo., disponibles ici.

 

  • Saint-Joseph - La Salle, Semur-en-Auxois (21) : Un flash mob sur les gestes "barrière" a été imaginé par les profs d’EPS. En fin d'année, ils organiseront un concours par classe afin d'élire le meilleur flash mob. Une manière à la fois drôle et sympathique de faire de l'exercice tout en se sensibilisant aux bonnes attitudes.

 

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