Pour une gouvernance de dialogue
Sur le thème « Dialogue et gouvernance », l’École des cadres missionnés (ECM) et le Sgec ont organisé les 1er et 2 avril dernier un séminaire à Montrouge (92). Objectif : croiser les regards pour aider les responsables de l’institution à développer une posture professionnelle en cohérence avec le projet de l’enseignement catholique.
Nicole Priou
« L’absence de responsabilité en partage fait du mal aux personnes », a déclaré Pascal Balmand, secrétaire général de l’enseignement catholique en ouverture du séminaire « Dialogue et gouvernance : l’altérité une chance » organisé par l’ECM (École des cadres missionnés) et le Sgec, le 1er avril dernier à Montrouge (92). C’est pourquoi, il est nécessaire de fonder la gouvernance sur le dialogue et l’intelligence collective.
Apports d’experts – exégète, philosophe, théologiens – et travaux de groupes se sont succédés pendant deux jours pour éclairer les pratiques et repérer les conditions d’une gouvernance féconde pour l’enseignement catholique. Béatrice Oiry, bibliste à l’Université catholique de l’Ouest (Uco), a commenté les trois premiers chapitres de la Genèse en rappelant que le langage peut être source de vérité ou de mensonge, à l’image de la langue bifide du serpent. Alors comment favoriser une parole de vérité ?
« On a souvent l’habitude d’opposer la parole et les actes or la parole peut être un acte », a fait remarquer, quant à lui, Fred Poché, philosophe à l’UCO, qui a listé les obstacles au dialogue : enfermement identitaire, approche prosélyte, peur de l’autre, survalorisation de modèles, relativisme, non contrôle de l’émotionnel. Pour les surmonter, le respect de quelques règles s’impose : ouverture à la pensée des autres, place pour le doute, courage pour assumer les conflits…
En fin de première journée, Véronique Margron, théologienne, a éclairé le concept d’altérité : « La relation d’altérité se tisse à l’articulation du proche et du lointain. » C’est « un labeur pour échapper à la fusion, à la domination, à la toute-puissance », « une condition sine qua non de la gouvernance ». Face à la vulnérabilité, condition du genre humain, comment « alléger le fardeau » ? « La pratique de la gouvernance n’a d’autre objet que de rendre possible ce qui ne le serait pas sans elle », a-t-elle insisté. D’où l’importance d’être à sa juste place et d’offrir à l’autre la possibilité de trouver la sienne.
Travailler au bonheur de soi et d’autrui
Caroline Runacher, doyenne de la faculté de théologie de Lille, a introduit la deuxième journée par une méditation, faisant écho aux propos de la veille : « Gouverner, c’est travailler au bonheur de soi et d’autrui en favorisant la place juste qui permet plus de bonheur dans le service. » François Chiron, théologien, a ensuite rappelé que l’Église ne fonctionne pas sur le modèle démocratique mais que certaines procédures issues de ce modèle pourraient être transposées à la gouvernance des établissements scolaires : rendre compte, faire place à la parole, prévoir des instances de contrôle. C’est l’abus de pouvoir, lié à une manière déviante de concevoir le fonctionnement de l’autorité, qui entrave une gouvernance de dialogue. La synodalité passe par le discernement, à plusieurs, de ce qui est bon ici et maintenant. Joseph Herveau, en charge de la pastorale au Sgec, a enfin mis en garde contre une tentation : choisir le dialogue plus pour être écouté que pour écouter ; plus pour trouver une place que pour donner une place à l’autre ; plus pour être reconnu que pour reconnaître autrui. La question de la place que l’on cherche, que l’on trouve ou pas, que l’on donne ou pas est revenue avec insistance pendant ces deux journées. En guise de synthèse, Jérôme Brunet, adjoint au secrétaire général, a repris une question de chaque intervention, offrant ainsi aux participants des pistes de travail pour des prolongements avec leurs équipes.