Faire école maternelle
Avancer l’obligation scolaire dès 3 ans… L’annonce présidentielle a quelque peu éclipsé l’impératif de synergie pointé par les Assises de la maternelle qui se sont tenues les 27 et 28 mars derniers. Pourtant, cette question pose avec acuité la problématique des continuités et des collaborations éducatives entre les maternelles et les crèches ou le périscolaire.
Aurélie Sobocinski
Il faut tout un village pour élever un enfant, et pour faire école, ajouterait-on volontiers à l’adage, à l’issue des Assises de l’école maternelle. Organisées par le ministère de l’Éducation nationale à Paris les 27 et 28 mars derniers, l’événement, placé sous le patronage du neuropsychiatre Boris Cyrulnik, avait pour objectif « de conforter et clarifier le rôle de la maternelle, et percer de nouvelles pistes pour accroître la réussite des jeunes français », a rappelé en préambule Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Education nationale.
Une École « du langage » –les apports de chercheurs en neurosciences et neuropsychologie notamment n’ont pas manqué pendant ces deux jours, insistant sur les bénéfices d’un développement langagier avant 6 ans-. Et en même temps, une école « de l’épanouissement » de l’enfant dans toutes ses dimensions, sensorielle, motrice, cognitive, sociale et affective, coupant court au débat sur la trop grande primarisation ou non de la maternelle. La question de la discontinuité des temps et des rythmes, autre sujet brûlant et crucial, n’a pas non plus été abordée.
Au final, on retient essentiellement de ces Assises les annonces liminaires du Président de la République sur l’avancement de l’âge de la scolarité obligatoire à 3 ans dès la rentrée 2019 lequel fera l’objet d’une disposition législative auprès du Parlement l’an prochain.
Professionnalité et concertation
Pourtant, la vraie nouveauté de ces assises, c’est le consensus qu’elles traduisent sur la nécessité d’une mobilisation commune et d’une action interdisciplinaire concertée, tant au sein de la communauté éducative, qu’avec les partenaires.
Comment mieux travailler ensemble ? La mise en place de la semaine scolaire à 4 jours et demi, en 2013-14, semble avoir impulsé un mouvement de rapprochement dans la réflexion entre l’école et les collectivités. Mais, outre le fait que cette forme d’organisation scolaire enregistre un net recul depuis la dernière rentrée, un nouveau cap reste à franchir. La place des parents et la question de la parentalité –grandes absentes des échanges- en ont confirmé l’urgence.
« Il nous faut arrêter avec les raisonnements fragmentaires, a insisté Boris Cyrulnik. En face de nous, il y a un enfant en voie de développement avec son style affectif, sa culture, son rapport à la langue, son environnement social, familial. On doit considérer toutes ces données hétérogènes et pour cela, il faut travailler en équipe et se coordonner dans l’intérêt de l’enfant mais aussi des adultes qui l’entourent ! »
« La gouvernance ne suffit pas, a fait valoir Georges Fottinos, ancien IGEN. Le cœur des problèmes ce sont les contenus et les pratiques, en particulier sur l’articulation scolaire-périscolaire. » Et tout autant sur l’articulation entre les professionnels de la crèche et ceux de l’école maternelle. Comment créer de la continuité éducative ? Le renforcement de la professionnalité des acteurs (enseignants, atsem, animateurs), la mise en place de temps de concertation partagés et des formations conjointes ont été évoqués. Des pistes concrètes qui seront « approfondies dans les prochaines semaines », a déclaré en conclusion le Dgesco, Jean-Marc Huart.
L’abaissement de la scolarité à 3 ans « va dans le bon sens »
À l’échelle nationale, pas de grand bouleversement en vue : 97% des enfants de plus de 3 ans sont déjà scolarisés et la majorité des écoles de maternelle de l’enseignement catholique sont déjà financées. « Dans l’attente du dialogue qui va s’engager avec les pouvoirs publics dans les semaines à venir sur l’application de la mesure, nous souhaitons seulement réaffirmer un principe de la République, celui de la gratuité pour tous les élèves qu’impose l’obligation de scolarisation », précise Yann Diraison, son adjoint.