Hommage à Nicole Fontaine
Elle alliait profondeur des convictions et sens de la conciliation. Nicole Fontaine, décédée le 17 mai 2018 à 76 ans, débuta au Secrétariat général de l’enseignement catholique la longue carrière qui la mena à la présidence du Parlement européen. De 1965 à 1984, cette juriste y accompagna – notamment comme secrétaire général adjoint- la mise en place de la loi Debré et défendit le principe constitutionnel de la liberté de l'enseignement, jusque dans les grandes manifestations contre le projet de loi Savary.
C’est à peine âgée de 22 ans, que Nicole Fontaine, jeune juriste rejoint le secrétariat général de l’enseignement catholique. Après y avoir mené une brillante scolarité, cette fille d'un médecin de la région du Havre ayant obtenu son bac à 15 ans, licenciée en droit, y accompagne la mise en œuvre de la loi Debré de 1959 sur laquelle elle prépare une thèse de doctorat de droit public qu’elle soutient en 1969.
Pendant plus de 20 ans, elle tiendra le rôle de médiatrice entre les établissements privés d’enseignement et les pouvoirs publics. De conseiller juridique, elle devient secrétaire général adjoint de 1972 à 1981, puis déléguée générale de 1981 à 1984, tout en siégeant au conseil supérieur de l’éducation et au Conseil économique et social.
Elle initia nombre des évolutions législatives et réglementaires qui, en deux décennies, ont façonné le cadre juridique de relations équilibrées entre l'Etat et les établissements catholiques.
Elle s’implique notamment dans la rédaction de la loi du 25 novembre 1977, qui transforme le principe d’aide de 1959 à celui d’égalité entre les deux types d’enseignement. Dans sa décision de validation, le Conseil Constitutionnel donnera valeur constitutionnelle à une liberté d’enseignement respectant le caractère propre des établissements privés.
Après l'arrivée de François Mitterand à la présidence, Nicole Fontaine s’employa à défendre ce principe constitutionnel, en première ligne des manifestations de 1984 contre le projet de loi Savary. Ces dernières aboutirent ainsi à une paix scolaire et la reconnaissance d’un pluralisme qui n’a plus été remis en cause depuis.
C’est après cette victoire, que débute sa carrière politique de centriste, qui, sous l'influence de Simone Veil et Jean Lecanuet, s'oriente très vite vers Strasbourg. Élue eurodéputée, elle s’attache à développer une Europe des citoyens, et principalement des jeunes. Mais elle porte également un intérêt aux projets sur la mobilité professionnelle et la liberté d’établissement. Réélue à maintes reprises, elle devient vice-présidente de l’UDF. L’année 1999 marque un tournant dans sa vie politique, car elle est élue présidente du parlement européen jusqu'en 2002, où elle entre au gouvernement de Jean-Pierre Raffarin en tant que ministre déléguée à l’industrie puis se retire de la vie politique en 2009 pour reprendre des activités de juristes. Jusqu’à ce qu'un cancer finissent par emporter cette femme de conviction, elle continua à analyser l'impact et les leçons à tirer du Brexit.
Emmanuel Macron, le président de la république a rendu hommage, vendredi 18 mai, à une femme dévouée, menant ses combats avec détermination et dans la « grande tradition de la démocratie chrétienne ». Elle rejoint aujourd’hui les noms ayant influencé notre époque et façonné notre société. Les acteurs de l’enseignement catholique tiennent à lui rendre hommage et à l’accompagner par la prière, ainsi que ses proches, dont sa fille et ses petits enfants.
Par Luc Holland et Virginie Leray