La Joliverie, moteur d’excellence
Connu à l’international pour sa voiture MicroJoule, le groupe scolaire La Joliverie (44) mise sur la pédagogie de projet pour faire réussir tous ses élèves. L’établissement, qui vient de fêter ses cent ans, pourrait être le premier Campus d’excellence
de l’enseignement catholique.
Coline Léger
Les 25 et 26 septembre derniers, le groupe scolaire La Joliverie célébrait cent ans de formation professionnelle, sur son site historique de Saint-Sébastien-sur-Loire, aux portes de Nantes. « Dès sa création par les Jésuites, sous le nom d’Institut professionnel catholique, l’établissement s’est tourné vers l’enseignement professionnel pour former des ingénieurs dans le domaine industriel », relate Patrick Bizet, le directeur général. Repris par le réseau La Salle, puis passé sous tutelle diocésaine, l’ensemble scolaire s’est depuis élargi au tertiaire et aux arts appliqués, sans jamais renoncer à l’industrie, pour répondre aux besoins du territoire. Il compte aujourd’hui 70 formations, pour 4 700 apprenants (de l’élémentaire à bac +5), dont 1600 étudiants et 700 apprentis en post-bac. Plus de 4 000 entreprises gravitent autour de l’établissement, parmi lesquelles de grands groupes industriels tels que le japonais Yaskawa (robotique), l’américain Haas (usinage), Manitou (matériel d’élévation), Renault... « Notre spécificité est d’offrir un parcours de formation complet qui comprend l’enseignement supérieur, que ce soit à La Joliverie ou via des partenariats : treize cursus sont proposés en co-formation, comme les bachelors Commerce, Marketing et Tourisme avec l’université de Coventry », précise Patrick Bizet, qui préside Excellence Pro Pays de la Loire (110 établissements et 30000 élèves), dont le but est de pour promouvoir les formations professionnalisantes.
« Notre objectif, c’est d’aider chaque élève à trouver son propre chemin », souligne- t-il. Pour y parvenir, La Joliverie, fidèle à son histoire, s’appuie sur la pédagogie de projet : « Les Jésuites souhaitaient confronter les jeunes au réel », rappelle le directeur de la Joliverie. Preuve en est le projet MicroJoule, qui l’a fait connaître dans le monde, lancé il y a plus de trente-cinq ans. Depuis, chaque année, les étudiants du BTS Moteurs à combustion interne conçoivent le moteur le plus économe en énergie et le plus puissant possible, pour la compétition internationale Eco-Marathon Shell. « Nous détenons le record du monde des économies d’énergie ! Porté par un enseignant, ce projet nous a permis de tisser des liens avec de nombreuses entreprises, comme Shell, GRTgaz, Michelin... mais aussi avec des écoles et des universités », ajoute Patrick Bizet.
Médaille d’or au concours des meilleurs apprentis de France
Ces projets offrent une approche pragmatique aux élèves pour lesquels l’abstraction est un frein dans l’acquisition des savoirs. «À travers les créations de mini-entreprises, menées avec le réseau Entreprendre pour apprendre, les jeunes développent des compétences dans un autre contexte que la classe, ils gagnent en responsabilité et en autonomie »,
témoigne Mathieu Longépé, enseignant en bac pro Métiers du commerce et de la vente (MCV). Ses élèves travaillent actuellement à la conception d’une poignée amovible pour se tenir dans un bus sans craindre d’attraper le coronavirus. « J’ai été recrutée comme Happiness Manager de notre mini-entreprise, un poste qui se développe : je suis chargée de la cohésion de groupe, j’ai plein d’idées ! Car nous devons coopérer et nous entraider pour faire avancer ce projet commun », détaille Emma, en 1re MCV. Les concours des meilleurs apprentis de France vont dans le même sens : « C’est très valorisant pour nos jeunes ! L’une de nos élèves de bac pro Métallerie, Marylou Raimbeaud, a ainsi remporté la médaille d’or nationale pour la conception d’un escalier », se réjouit Patrick Bizet.
Des stages à l‘international
Quant aux témoignages de professionnels sur leur parcours, ils aident les élèves à se projeter dans un métier : « Ça contribue à lever des freins. Par exemple, j’aime faire intervenir des femmes chefs d’entreprise », détaille Mathieu Longépé, qui travaille avec le réseau 100000 entrepreneurs.
Les matières plus classiques bénéficient aussi de mises en situation, à travers les heures des co-intervention avec les enseignants des matières professionnelles. Un exemple : «Avec les élèves de la filière Électricité, nous travaillons sur deux projets : un film de prévention sur les accidents de chantier, pour lequel ils doivent rédiger un scénario et se filmer ; un itinéraire littéraire qui va les conduire à enregistrer des poèmes et concevoir un détecteur qui les diffusera quand on passera devant leur espace, lors des journées portes ouvertes », explique Amalia Dekokère, enseignante de lettres et d’histoire.
Autre défi : développer leur sensibilité à l’international, qui est l’une des spécificités de l’établissement. « Seuls 4 % des jeunes de lycée professionnel font des stages à l’étranger. Les élèves pensent que ce n’est pas pour eux. D’où l’importance, là encore, de leur montrer que c’est possible », souligne Mathieu Longépé. Les enseignants encouragent les élèves de bac pro à participer au programme Erasmus Plus, qu’ils soient en Électricité, en Gestion administration, en Métallerie, ou en Commerce et Vente ! « Ça les impressionne, à 17 ans, de partir loin de leur famille, mais des enseignants sont présents », précise Amalia Dekokère. Avec les équipes pédagogiques, elle monte les dossiers de financement pour obtenir les bourses nécessaires à leurs voyages et stages à l’étranger : « Les jeunes reviennent fiers d’être parvenus à intégrer le monde de l’entreprise dans un pays dont ils ignoraient tout ! », se réjouit-elle. Ces expériences réussies sont le résultat de l’accompagnement offert aux élèves, tout au long de leur scolarité. «Les plus fragiles sont les 3es prépa métiers qui arrivent souvent fâchés avec l’École et qui ne savent pas encore vers quoi s’orienter, souligne Amalia Dekokère. Nous travaillons à leur redonner confiance, en mettant en valeur leur investissement. À partir de la 2de professionnelle, les élèves ont choisi une formation qui leur plaît : ils sont motivés.» Un environnement qui incite nombre d’entre eux à choisir la poursuite d’études, au sein de l’établissement ou à l’extérieur.
La voie pro s'affiche sur le Web
En 2021, l’enseignement catholique ouvrira le premier showroom virtuel de ses formations pro. Cette vitrine attractive permettra aux jeunes et à leurs familles de découvrir tous les établissements de son réseau qui proposent ces filières et préparent ainsi à une large palette de métiers. Une grande première!
Marie-Amélie Marq
La dynamique Excellence Pro se poursuit sur la Toile!
Sous l’égide de RenaSup, une équipe prépare actuellement une vitrine dédiée à la promotion de la voie pro. Tous les réseaux de l’enseignement catholique et les acteurs publics et privés sont associés à ce travail. L’objectif visé rejoint celui du salon, prévu en mars dernier à Paris, qui n’a pu se tenir du fait de la pandémie: présenter tout l’éventail des filières et des métiers, « faire connaître nos propositions et nos méthodes aux familles mais aussi aux entreprises pour mettre en avant la pertinence de l’enseignement catholique dans le domaine de la formation professionnelle» annonce Jean-Marc Petit, délégué général de RenaSup.
Cette plateforme virtuelle verra le jour au cours du premier trimestre 2021. Conçue comme un lieu d’exposition des formations professionnalisantes de l’enseignement catholique, elle intègrera les trois entrées prévues au salon de la Villette: « Opco », « Régions » et « Dynamiques éducatives ».
Chacun pourra s’arrêter dans le hall d’entrée et accéder facilement au descriptif des formations proposées sur les stands de chaque établissement de la voie pro, référencé par son Opco. Le visiteur pourra aussi s’orienter grâce à une cartographie des territoires et des structures régionales de l’enseignement catholique, dont les grandes orientations en matière de formation lui seront également présentées.
Ce premier showroom de la voie pro, ouvert aux jeunes et aux familles mais aussi au monde professionnel, sera animé par de nombreux temps forts, tant au niveau national que régional et tout au long de l’année. Au programme : des tables rondes, des rencontres avec des professionnels, des webinaires...
Mais si, comme Jean-Marc Petit le rappelle, le cap et la structure sont proposés par RenaSup, associé au Cneap, « c’est de la mobilisation dans les territoires que viendra le succès de l’entreprise ».
À bientôt sur la plateforme du pro !
Un Campus Design et industrie du futur
Le label Campus des métiers et des qualifications et, pour les établissements les plus innovants, le label Campus d’excellence, ont été mis en place par le ministère de l’Éducation nationale. Ils visent à créer des synergies au sein d’un territoire entre les acteurs de l’éducation et ceux d’une filière économique pour construire les métiers de demain. « Nous travaillons à l’obtention de ces deux labels de façon concomitante », indique Patrick Bizet. L’ensemble scolaire qu’il dirige, La Joliverie, situé au sud de Nantes, pourrait ainsi devenir le premier établissement de l’enseignement catholique à être reconnu comme support d’un Campus d’excellence. Onze critères sont requis pour y prétendre : « Ce n’est pas l’établissement en tant que tel qui est labellisé, mais le réseau d’écoles et d’entreprises dont il est le pivot. Ces établissements, inspirés des campus américains comme Harvard, offrent une ouverture à l’international et développent des projets sportifs », détaille Patrick Bizet. Contrairement aux autres campus, La Joliverie ne se positionne pas sur une filière, mais sur la famille de métiers « Design et industrie du futur » : « Je crois en la transversalité », explique le directeur, qui a le soutien des acteurs économiques et politiques du territoire. L’établissement, qui s’apprête à déposer son dossier, espère obtenir le label courant 2021.