Pour une culture inclusive commune
Plus de 72 référents Éducation inclusive de l'Enseignement catholique -sur un réseau de 90 qui accueille cette année un tiers de nouveaux membres- ont tenu leurs journées de réflexion, en distanciel à cause des grèves, du 8 au 10 mars 2023. L’occasion pour eux de dresser un bilan de ces derniers deux ans, doublement compliqués par la Covid-19 et par la perspective d’une nouvelle refonte du Cappei, formation certifiante des enseignants spécialisés. La session a aussi permis d’introniser Solveg Wattel, qui succède à Marie-Odile Plançon pour animer le réseau de l’école inclusive.
Faire de l’accueil de tous une culture commune et partagée. Le thème des journées 2023 des référents École inclusive de l’Enseignement catholique a permis à Philippe Delorme, son secrétaire général, de saluer leur dynamisme : « Vous jouez un rôle essentiel dans la construction d’une société plus fraternelle en apprenant à nos jeunes à vivre avec l’autre, différent, en permettant à l’Enseignement catholique d’exprimer son ADN inclusif et en inventant sans cesse de nouvelles modalités d’accompagnement éducatif », a-t-il souligné, en incitant l’auditoire à mettre sa créativité au service de la Prospective.
Justement, les trois journées de sessions ont proposé aux participants une relecture de la galaxie de dispositifs aidant à la scolarisation d’élèves en situation de handicap (cf. récapitulatif ci-contre). Ce travail réflexif et coopératif a amené les référents diocésains à interroger chaque structure sur trois champs, à l’aide d’intervenants : Benoit Skouratko, spécialiste des dynamiques d’orientation pour le Pôle Éducation du Sgec, a ainsi présenté les évolutions en matière d’accompagnement des parcours scolaires et des parcours de vie. Raphael David, chargé de mission à la direction diocésaine de Nantes, a évoqué la richesse des échanges professionnels, illustrés par Lab'co, un laboratoire de co-enseignement monté en Loire-Atlantique avec la chercheuse en sciences de l’éducation Marie Toullec. Julia Midelet, enseignante spécialisée et formatrice à l’Inspé de Caen, a quant à elle abordé la progressive adaptation du milieu scolaire ordinaire à travers une utilisation raisonnée des compensations.
Un AESH pour 8 enseignants
Avec 439 000 élèves en situation de handicap, en progression annuelle de 7% depuis dix ans, il s’agissait aussi de rechercher une vision partagée autour des orientations ministérielles. Charles Rozoy, conseiller de la Ministre déléguée chargée des personnes handicapées, a notamment présenté les enjeux de la conférence nationale du handicap à venir, entre autres celui du rapprochement entre l’École et le médico-social. Une alliance qui pourrait aider à résoudre l’équation de l’accompagnement : alors que les 132 000 AESH en poste actuellement -soit un pour huit enseignants et soit autant que de professeurs dans l’Enseignement catholique- ne suffisent pas à honorer les prescriptions MDPH qui vont toujours croissant.
En matière d’outils communs, Jean-Bernard Alcaras, adjoint au chef du bureau de l’école inclusive a présenté le LPI, lancé voilà un an – 130 000 ouverts à ce jour. Cette interface permet de formaliser et de partager les aménagements scolaires mis en œuvre pour un élève, en situation de handicap ou non, avec leurs évolutions et de disposer de propositions issues du site de Canopé Cap école inclusive qui viennent enrichir le panel d’adaptations.
À terme, son articulation avec Agesh et Incluscol ainsi que son ouverture aux familles et aux enseignants itinérants ou travaillant sur plusieurs établissements sont très attendues, même si la question de l’accès aux professionnels de santé ne disposant pas de codes Éducation nationale, avec lesquels l’Enseignement catholique travaille majoritairement n’est pas encore résolue.
Le CFA adapté porté par le Café Joyeux, les actions de l’Apel en matière de lutte contre la phobie scolaire et celles de l’Ugsel en faveur de l’accessibilité sportive, des initiatives en lien avec la posture professionnelle d’accompagnement ou avec la création de baromètres inclusifs en établissement pour objectiver les avancées et marges de progression… autant d'initiatives que la session a mis à l'honneur. De quoi participer à professionnaliser et dynamiser l’école inclusive dont le théologien François Moog a resitué les visées dans l'horizon d’éducation intégrale de la personne, en clôture de la session. Une mise en perspective spirituelle très appréciée des participants, heureux de cette occasion de s’extraire du quotidien des urgences pour prendre de la hauteur.
Une galaxie de dispositifs inclusifs
Mijec
Service diocésain ou interdiocésain de prévention du décrochage scolaire et d’accompagnement à l’orientation réfléchit à pousser plus loin les logiques de mutualisation.
Réseaux d'aide
Ce dispositif d’accompagnement des élèves en difficulté scolaire est devenu également un pôle ressources pour leurs enseignants et réfléchit aux espaces temps que requiert cette mission nouvelle ainsi que son extension en sixième.
Unités d’enseignement externalisées
Structures de scolarisation adaptée relocalisées dans des établissements scolaires. Ce mouvement de désinstitutionnalisation nécessite une clarification juridique et un métissage de cultures professionnelles qui rendent les fonctionnements fluides et efficients.
Ulis
Les unités locales d’inclusion scolaire, devenues des incontournables de l’école inclusive travaillent encore à devenir de véritables outils de compensation et un tremplin vers toujours plus d’inclusion en milieu ordinaire.
Ulis pro
Dispositifs éminemment partenariaux prenant le relais des Ulis pour travailler l’insertion professionnel en fin de parcours scolaire adapté.
Dispositifs TSA
Aussi variés que la palette des Troubles du spectre autistique, ces structures participent activement à changer les représentations autour du handicap mental mais posent aussi un enjeu de coordination important entre ces entités au service de la fluidité des parcours de jeunes.
UPE2A
Dispositif pour l’accueil d’élèves primo-arrivants et allophones dans le système éducatif français qui œuvre à mieux articuler les missions d’enseignants de FLE et d’enseignants spécialisés.
AESH et pause méridienne : la continuité de l'accompagnement toujours en question
La non résolution de la question de la prise en charge financière des AESH sur le temps de la pause méridienne continue de causer de nombreuses ruptures de service au détriment des élèves en situation de handicap. Il s’agit, rappelons-le, d’élèves qui ont une notification spécifique sur le temps méridien parce qu’ils sont dans l’impossibilité de déjeuner seuls. Si ce dossier ne représente en matière de budget « que » quelques millions d'euros et donc une infime partie dans une enveloppe globale de 2,4 milliards – en constante inflation - dédiée aux AESH, il reste en suspens depuis novembre 2020, ce qui oblige les équipes pédagogiques à bricoler des solutions qui ne sont pas satisfaisantes.
Le Sgec sera auditionné sur cette question le 30 mars prochain par une mission d’information sénatoriale qui travaille notamment sur ce sujet et espère, tout comme les collectivités locales, qu’une solution pérenne pourra être trouvée pour assurer la continuité de l’accompagnement éducatif des élèves handicapés.
Cappei, nouvelle mouture
La formation Cappei se rénove à la rentrée 2023, ce qui offre l’occasion d’améliorer encore la proximité entre les acteurs, le suivi des stagiaires et l’harmonisation des contenus vers une professionnalisation accrue. Les inscriptions sont ouvertes jusqu'au 24 mars.
Les réponses encore partielles à un sondage lancé auprès des chargés de mission fait apparaître un taux de 20% de postes d’enseignants spécialisés non encore formés, parfois occupés par des suppléants CDIsés, également éligibles au Cappei. C’est dire l’importance d’intensifier les départs en formation afin d’éviter que l’écart observé avec le public ne se creuse, les postes occupés par des enseignants non formés étant, de fait, menacés.
Pour inciter à s’inscrire dans un processus de certification réputé exigeant, le lien entre les chargés de mission et les équipes des Isfec est amené à se resserrer au profit d’un suivi renforcé des stagiaires. Pour davantage de proximité, en plus des cinq Isfec « historiques », deux nouveaux Isfec proposeront un tronc commun harmonisé et davantage professionnalisé du Cappei à la rentrée.
L’accompagnement sera renforcé à l’aide de journées perlées -en présentiel et distanciel- dans chacun de ces centres.
L’enjeu est bien d’envoyer 150 enseignants en formation, en majorité parmi ceux qui prennent justement un poste ouvrant à une certification. « La souplesse prévaudra pour cette première année de refonte qui met l'accent sur un suivi renforcé et plus en proximité des candidats », rassure Nathalie Tretiakow, adjointe au secrétaire général. Celle-ci souhaite aussi que l’Enseignement catholique soit mieux représenté dans les jurys du Cappei, afin de prévenir tout suspicion d’inéquité entre public et du privé. En la matière, la marge de progression est également importante : si les groupes régionaux École inclusive, instance d’échanges entre les acteurs de l’Enseignement catholique et les autorités académiques, fonctionnent globalement bien, l’Enseignement catholique ne siège que dans 30% des jurys de Cappei avec au moins six lieux de blocage déjà identifiés.
Pour tout savoir sur le Cappei nouvelle mouture :
Le Webinaire du 21 mars.